Une autre saison... une heure en moins aux ténèbres pour ce cycle nouveau.
Les ténèbres se sont insinuées dans sa chambre depuis la fin de l’été. Le froid, les gelures sur les vitres laissent bientôt place à une douce moiteur qui lentement annonce le refleurissement, la vie qui s’extirpe des bras glacés de l’hiver. Étrange cycle qui n’en finit pas… mourir pour renaître… tout comme l’humain meurt de la morsure et renaît par le cruor. -Humain qui désir tant l’immortalité et qui une fois ayant vécu sa tristesse ne désir plus que la mort pour s’en libérer.- Pourtant… cette Mort est toujours aussi mystérieuse pour celui qui ne meurt pas et qui la désir. Au regard de Gin, la Mort n’est qu’un puits d’envies, d’expériences et de déceptions… quand y arrivera-t-il… oui, quand pourra-t-il se l’enfermer, se promettre l’éternité.
La vie lui en serait plus joyeuse ? Non… Un être qui ne vie que par les ténèbres et l’observation, qui n’est que spectateur de la vie, ne peut pas demeurer dans une éternité de bonheurs et de malheurs successifs. Il restera là, statue de marbre, observateur du temps qui passe, incapable de mourir, égoïste de sa propre conscience.
*Jamais je n’accepterais le néant qui m’attend. *Un regard vient de ciller au milieu de cette pièce pourtant vide de présence en apparence.
Aucun mouvement, aucun souffle et pourtant, l’une de ces décorations plantées ici vient de frémir. La silhouette assise sur le bord du lit se redresse lentement, la vie s’emparerait-elle de l’une de ses statues sculptées à l’effigie de l’homme ? Non, Kira est bel et bien ‘vivant’, doué de mobilité et de raison.
Le temps pour lui n’est que perception et il sait se le ralentir à souhait, se rendre plus rapide à l’œil ‘aveugle’ de l’humain, se ralentir pour réfléchir et reposer son esprit tourmenté.
Ses pas lents le guident au milieu des ténèbres, vers les rideaux épais et sombres qui cachent entièrement la large fenêtre de sa chambre.
Portant ses doigts minces et blafards contre le tissu noir, il laisse un rayon vivace de lumière faire fuir les ombres de sa chambre. Le combat perpétuel de la nuit et du jour. Cette lueur avait pénétrer ses lieux d’une tel violence que Kira aurait pu sentir les sombres frémir de cette attaque brutale :
« Ne vous en faites pas… ici le jour n’a pas d’emprise sur vous… le monde bientôt tombera dans l’ombre. Lorsque les nuages noirs empliront le ciel de leur humidité nauséabonde, lorsque sol ne rendra plus rien de vert… Les ténèbres gagneront leurs combats. »Se tournant vers l’intérieur de sa chambre laissant le ridons retomber sur le rayon lumineux, d’où danse quelques particules de poussière, le vampire reprend seul :
« Je ne suis pas prophète, mais ici les hommes ont raison de la nature et vous aurez raison d'eux.
Je les connais…»La créature ténébreuse s’avance en silence dans le noir retombé, voyant de ses yeux de nocturne le chemin à prendre jusqu’à sa porte.
« Et une fois encore, l’ombre part affronter la lueur du soleil. Une ombre mouvante parmi les clartés brûlantes. »Sa voix se perd dans le couloir, derrière le panneau de bois sur gonds refermé contre ses opacités.
Vêtu de noir des pieds au buste, le demi vampire Kira n’inspire pas plus le joie, malgré ce masque de neutralité qu’il apprend à se donner, ni mauvais ni bon. Même si le sourire semble encore faire tache sur ses lèvres inertes, Gin s’insinue lentement dans le monde social, telle la nuit s’avance sur le jour sans s’y mêler.
D’un pas plus rapide et détaché qu’à l’ordinaire, imitant ses jeunes de son âges, il salut d’un sourire les élèves sur son chemin. Il lui fallait se dérouiller un peu les maxillaires pour sembler plus crédible, passer plusieurs jours en mode ‘naturel’ n’était pas bon pour son ‘image’. Les mains dans les poches, à la mode j’m’enfoutiste, il se dirige vers le parc, en recherche d’âme sociale.
Le dernier a avoir rencontré son esprit était un dénommé Motohideyo… être sans aucun intérêt, si ce n’est que de lui servir de sujet expérimental. Remarque, cela pourrait être drôle de mettre à bas une créature aussi sûre d’elle, faire dégringoler son escalier d’estime personnelle et son rang de prince aussi facilement.
Marchant calmement sur les sentiers sans relâcher ce masque ‘joyeux’ sur son visage, la créature au teint d’albâtre et aux cheveux d’ébène semble se confronté à une silhouette qu’il lui semble reconnaître. Une jeune femme de son aile semble-t-il ? Les ombres voient et entendent bon nombre de choses que les bouches et les regards ne auraient maîtriser.
S’approchant de la jeune femme, la silhouette d’ombre en plein jour s’avance en quelques propos :
« Bonjour mademoiselle… belle journée n’est-ce pas ? »Changement… quels changements effectivement, entre ce qu’il était avant et ce qu’il devenait. Ses paroles qui s’écoulaient de ses lèvres n’avaient aucun sens à sa raison, mais dans le monde social ce genre de question n’a plus sa place dans la banalité.