[HRP : j'ai kické le frangin (mdr ^^) tu n'auras pas à attendre demain si jamais tu souffres d'insomnie]

A mesure que l'automne approchait les journée se faisaient de plus en plus courtes. Pensant pouvoir faire une dernière ballade au village avant la tombée de la nuit, Diane avait quitté le château dans lequel elle était restée enfermée toute la journée. Elle avait grand besoin de respirer, qu'importe l'heure. Elle n'avait pourtant pas l'impression que le soleil descendait si vite...

Pour l'accompagner dans sa promenade, elle avait appelé son cheval, parti brouter à sa guise dans le parc de Cairn. A califourchon sans selle, en tenue de cuir, une cape un peu déchirée jetée sur les épaules, sa longue et épaisse tignasse de cheveux emmêlés, Diane avait vraiment l'air d'une petite sauvageonne. Ce qui lui valut le regard désapprobateur des quelques villageois qui fermaient leurs échopes. Les mines curieuses des personnes qu'elle croisait la gênaient, c'est pourquoi elle préféra rabattre le capuchon de sa cape sur sa tête.

Les rues se vidèrent assez rapidement et bientôt la pénombre fut totale. Seule la pleine lune éclairait encore les chemins de cailloux blancs. La prudence aurait voulu qu'elle rentre au château, mais Diane était insouciante et n'avait de toutes façons aucune envie de retourner s'enfermer dans sa chambre. Les rênes longues, elle laissa son cheval prendre des chemins au hasard. Après un petit quart d'heure à flâner ainsi, son regard fut attirer par quelque chose. Un long mur qui n'entourait aucune maison, avec un grand portail en fer forgé et un tas de pierre alignée à l'intérieur. Elle ne le savait pas encore mais Diane se trouvait face à un cimetière. Dans sa culture, on incinerait les morts, les cendres retournaient à la terre, et aucune stèle ni monument n'était dressé en l'honneur des défunts. On n'avait pas besoin d'objets pour se rappeler des personnes qu'on avait aimé.

Intriguée, la jeune amazone arrêta son cheval devant les grilles et mis pieds à terre. L'endroit n'inspirait aucune chaleur et cet ambiance sinistre était accentué par la lumière blafarde de la pleine lune. Diane avança a petit pas entre les allées, lisant ce qui était écrit sur chacune des stèles. Une date, un nom, parfois une citation...elle devina rapidement de quoi il s'agissait. Et cela l'étonna.

Quelle étrange façon d'appréhender la mort ! Pourquoi tous les mettre au même endroit ? pourquoi garder une pierre ? comment faire son deuil avec un objet toujours présent pour nous rappeler la tristesse d'une disparition ? La jeune femme haussa les épaules. encore une coutume du coin qu'elle devrait apprendre... Malgré tout, l'endroit lui plaisait assez. Certaine tombe était bien ouvragé, et au lieu de ressentir un sentiment morbide devant la mort, elle la ressentait plutôt comme un apaisement. Elle avait l'impression d'être dans un grand dortoir ou personne n'était jamais dérangé dans son sommeil. Diane s'installa sur la tombe la plus haute de façon a surplomber tout le cimetière et sortit un petite pipe de sa besace qu'elle bourra avec de feuilles séchées. Pas vraiment du tabac, pas non plus du cannabis, mais une plante bien de chez elle au parfum sucré et qui détend sans rendre parano. Elle craqua une allumette (une invention découverte récemment qu'elle trouvait brillante !) et alluma sa pipe, tirant quelque bouffé. Savourant cet instant de calme, elle vida son esprit, immobile, silencieuse....vulnérable ?

Dès que la nuit fut tombée, Kay sortit de sa tanière. Nonchalant il traversa la rue de son quartier sans s’intéresser à quelques ados réunies autour de bouteilles de bière vides. Il longea quelques rues levant les yeux au ciel pour regarder sa maîtresse bien présente ce soir. Il divagua dans d’autres rues plus peuplées puis baissa un peu les yeux vers l’église qui s’affichait haute et distingué au-dessus de tout le monde, mais sous les caprices de sa lune qui la regardait de bien plus haut. Il fronça légèrement les sourcils et continua son chemin, errant dans les rues où des couples longeaient les murs avec leur amour et les saoulons avec leur amère solitude. Kay quant à lui marchait au centre de la rue avec l’ennui à ses côtés.

Il s’arrêta une fois de plus pour lever les yeux vers l’église qui le dévisageait. Il leva une main pour cacher la haute église avec sa paume. Ce petit jeu le fit sourire puis reprit sa marche infernale. Le nez en l’air ne se souciant guère de la populace qui rentrait paisiblement chez eux. La lune montait lentement vers le ciel pour mettre son emprise sur son élève adoré. Celui-ci arriva face à l’église avec un grand sourire illuminé par la folie et l’étrange.

Kay avança vers l’église pour aller franchir les grandes portes de l’église bénite des dieux humains. Au moment où il posa ses doigts sur la lourde porte, son regard divagua vers le cimetière. Il plissa des yeux et leva la tête pour regarder de son œil viable. Apparemment il avait aperçu quelques choses… Il recula d’un pas puis d’un deuxième pour être face au cimetière pour le regarder du dernier palier du lieu culte humain. L’homme avança de quelques pas et un plus grand sourire s’afficha sur ses fines lèvres dessécher.

- Loup y es tu? que fais-tu? Entends-tu? Je vais à la chasse… ahahah…

Murmura-t-il en descendant lentement le palier pour passer par la petite porte de fer sur le côté de l’église. La porte grinça alors que l’homme la poussa lentement pour entrer et pour bien la refermer derrière lui. Puis avança lentement entre les tombes pour s’approcher d’une ombre qui se dessinait devant lui dans l’ombre de la nuit. Il fit glisser ses doigts sur les tombes laissant pendre ses bras dans le vide ne faisant aucun effort pour se tenir droit. Son regard s’agrandit légèrement plus qu’il avançait. Il laissa tomber sa tête sur le côté puis se laissa le ventre contre une tombe de pierre. Il grimpa lentement dessus la chose à quelques mètres encore de lui. Il appuya sa tête contre le froid de la pierre laissant pendre un bras dans le néant et l’autre replié vers sa tête.

- N’est-il pas un peu tard pour tenir compagnie aux âmes oubliées?

Souffla-t-il d’une voix douce et peut-être trop amicale presque enfantine. Son regard était fixé sur l’ombre qui se dessinait dans la nuit. La lune posait son regard sur les deux individus, alors que Kay gardait sa tête posée sur la pierre comme si on avait lâché toutes les cordes du pantin. Le corps animé seuls son regard et ses lèvres semblaient encore en vie. Son œil blanc fixé sur la chose devant lui et l’autre plus paisible portait un regard presque doux…

Toujours perché en haut de sa tombe, tournant le dos à l’entrée du cimetière, Diane se laissait aller à la rêverie, regardant nonchalamment les volutes de fumées blanche qui s’échappait de sa pipe. Un bruit la tira cependant de son songe éveillé. Le grincement de la grille du cimetière la fit légèrement sursauter. Elle se retourna vivement, retira la pipe de sa bouche et tenta d’apercevoir un mouvement dans l’obscurité. Aux aguets, elle tendit l’oreille et entendit un léger bruit de pas, un peu irrégulier. La jeune femme fronça les sourcils, inquiète. Elle porta la main à sa ceinture, prête à dégainer son couteau, plissant les yeux pour essayer de distinguer cette présence qu’elle ressentait maintenant très clairement.

Citation :

-N’est-il pas un peu tard pour tenir compagnie aux âmes oubliées?

La voix résonna dans son dos. Et bien qu’elle ne fut nullement agressive, elle fit sursauter l’amazone qui manqua de tomber de son perchoir, se rattrapant de justesse à la pierre. Ce mouvement brusque fit tomber sa capuche et révéla son visage et sa crinière de cheveux. La jeune femme se retourna pour voir à qui elle avait affaire mais seul une silhouette noire avachie sur une pierre se découpait parmi les pierres.

« Vous m’avez fait peur ! » protesta Diane sans vraiment réfléchir.

Un silence s’installa. Diane était toujours méfiante, elle fixait le visage de son interlocuteur que la lune commençait peu à peu à réveler. Il avait le tein blafard, des yeux étranges, des lèvres fines, une silhouette androgyne…L’amazone ne savait pas trop si elle avait affaire à un homme ou à une femme… Alors qu’elle réfléchissait à tout cela, elle se souvint qu’on lui avait posé une question à laquelle elle n’avait pas répondu.

« Il sera tard quand je serai fatiguée » dit elle sur un ton un peu espiègle, retournant à sa pipe.

Elle tira quelques bouffées puis lâcha dans un murmure…

« …et vos morts ne doivent pas manquer de compagnie puisqu’ils sont tous au même endroit… »

Maintenant qu’elle avait repérer Kay, la jeune femme n’avait plus peur. Elle ne se sentait plus menacée. La plupart des gens se serait méfier d’un type bizarre rencontrée dans un cimetière, mais Diane ne partageait pas cette vision. Naïve, elle ne se rendait pas compte qu’une compagnie pareil dans un endroit aussi paisible puisse être d’un quelconque danger.

Elle leva les yeux vers la lune qui révela un petit sourire sur son visage.

« Vous venez pour profitez du calme, vous aussi ? C’est la première fois que je viens mais…j’aime bien cette endroit. »

Kay observa la jeune femme gardant la tête contre la froide pierre de ce lieu sacré par les « siens ». Il semblait observer attentivement la demoiselle qui la regardait. Il ne bougeait pas, seul un sourire s’affichait sur les fines lèvres de l’homme qui lui donnait un peu d’humanité qu’il avait perdu au cours des nuits de Lune et de folie. Il observa de sa tombe la femme peu habillée sans pour autant broncher ou désapprouver la tenue. Alors que la lune posa ses rayons sur la jeune femme pour la caresser d’une tendre lumière de la nuit, l’homme continua à l’observer dans le silence le plus prude qu’il existait. Pas un mot, pas un son, un simple regard amusé et un corps totalement inanimé. Il ne semblait pas préoccuper de la tenue de la jeune femme ou encore de son air peu commun.

Son œil mort sembla briller un bref instant quand elle parla des morts et de leur nombre regrouper.

- Tous au même endroit? Ce ne sont que des corps et cendre et de la vie nouvelle. Les âmes sont prises souvent sur terre avec leur secret qu’ils n’ont jamais pu dévoiler. Les hommes ont peur de la mort et de la solitude, ils ont peur de mourir seuls… Abandonné, dénudé et que la terre ne leur soit pas reconnaissante d’avoir vécu et d’être morte sur elle. En réalité bien qu’ils soient regroupés je ne crois pas qu’il trouve le repos éternel, car ils sont avec leur éternel secret à se battre pour protéger contre les âmes meurtries par les années de maltraitance de ses semblables qui leur refuse le repos en les oubliant sans leur dire leur vérité ni leur pardon. Combien d’âme ici repose en paix en réalité… Aucune. Ils crient leur désespoir dans ce lieu inanimé, sans vie, sans chaleur, sans paroles, sans semblable… Les familles les oublient et la personne morte d’orgueil à côté d’eux n’a rien à faire de leur présence maudite qui gâche la chance de sauvegarder leur infâme secret dans leur tombe…. Je ne profite pas du calme mademoiselle, car ce lieu regorge d’âme turbulente et empreint de folie qui entraîne ses proches dans le grand malheur de devoir se reparler d’un odieux personnage qui a outrepassé ses droits d’homme. Ce lieu m’ennuie, je n’y ai vu qu’une âme insouciante s’y asseoir alors je l’ai rejoint. Je préfère la vie de la ville avec son angoisse et son anxiété. Ce lieu m’apporte rien, même pas un souvenir, puisqu’ici il n’y a rien, ce n’est qu’une carrière de roche qu’on a odieusement décorée en l’honneur d’homme qui ne le méritait pas.

Kay se retourna sur le dos pour regarder le ciel et se laisser caresser par les doux rayons de sa maitresse qui devait surement lui donner raison. Les yeux rivés sur le ciel, une main sur son cœur et l’autre pendante dans le vide ses doigts frôlant l’herbe mal coupée de ce lieu bien trop souvent oubliée. Son œil viable roula pour regarder de coté la jeune femme, son œil bleu semblait sortir du plus profond des enfers avec l’étrange lueur de son discours au fond de ses yeux aussi vides que le néant. La vie dans son œil semblait avoir depuis longtemps avoir quitté, puisqu’aucune raison et aucun amour ne semblaient y vivre. L’autre, son œil blanc, semblait depuis bien trop longtemps déjà n’avoir jamais vécu d’amour et de compassion.

Le silence retomba sur le cimetière alors que Diane s’attendait plutôt au traditionnel échange de politesse des nouvelles rencontres. Le silence qui précéda le discours de Kay la mis un peu mal à l’aise. Etant plutôt naïve, elle n’avait pas trouvé le personnage inquiétant au premier abord. Mais son silence et son expression figée la perturbait maintenant un peu. Puis il ouvrit la bouche et commença à parler.

Diane ne saisit pas tout ce flot de parole. Poétique mais très triste. Elle ne comprenait pas pourquoi le jeune garçon méprisait autant les personnes mortes ici. Un peu perplexe, elle le laissa terminer son discours et fixa un instant ses chaussures avant de reprendre la parole.

« Mais…qui vous dit que toutes les personnes ici n’ont pas mérité qu’on se souvienne d’eux ? Plutôt qu’un désespoir, je ressens plutôt la mort comme un repos, un apaisement… »

Sa voix s’éteignit doucement. Elle n’était pas d’accord avec Kay, et de manière générale, elle n’était pas non plus d’accord avec le culte des morts de cette région. Dans sa tribu, on n’accordait pas grande importance à l’enveloppe charnel, on la rendait à la nature. Et on avait pas besoin d’un endroit et d’une pierre tombale pour se souvenir des gens qu’on aimait. Perdue dans ses pensées, elle entendit son interlocuteur bougé sur la pierre à côté d’elle. Elle se tourna sur le côté et s’allongea sur son propre perchoir, à la manière d’un félin, et observa la visage de Kay. Il avait des yeux étranges qu’elle distinguait avec peine à travers l’obscurité. Elle croisa son regard triste et détourna les yeux.

« J’arrive de loin, je ne connais pas encore très bien vos coutumes…Je ne sais pas trop ce que signifie toutes ces pierres avec des noms, si c’est un cadeau, une punition pour les mort ou un objet pour que les vivants se souviennent. »

Un nouveau silence. Diane était allongé de toute son long sur la pierre, la tête posée sur son bras, la pipe coincé au coin de la bouche. Elle regardait Kay avec curiosité. Bien que sa silhouette fut androgyne et que la pénombre l’empêchait de bien distinguer ses traits, Diane comprit qu’elle avait affaire à une personne de sexe masculin, probablement grâce à sa voix. Il n’avait rien à voir avec les paysans et les guerriers qu’elle avait croiser auparavant. Cela ne la rassurait pas pour autant, mais attisait sa curiosité. Elle ne connaissait même pas son nom, et lorsque cette pensée lui traversa l’esprit elle se rendit compte qu’elle-même ne s’était pas présentée. Elle sortit d’abord la boite d’allumette de sa poche.

« Au fait, je m’appelle Diane »

Et en prononçant son nom, elle craque une allumette et la porta à son visage pour l’éclairer. Kay put distinguer ses traits et son sourire pendant 5 secondes avant que la flamme ne meurt. En se présentant, elle espérait que son interlocuteur lui révèle son nom à son tour. Et peut être même son visage. Pour l’inviter à se révéler, elle lui tendit la boite d’allumette.

[Désolé de mon temps de réponse, pas de fouet je vous pris. Aimerais-je trop ça?]

Kay fixa les rayons de lune qui s’échappaient au travers des nuages, partie seul dans son propre monde, il sembla gardé juste assez contact avec la réalité pour entendre les paroles poussées jusqu’à lui. Il échappa un petit rire aux premières paroles de la jeune femme et garda son regard sur le ciel qui chérissait tant. L’homme sembla s’amuser et étira ses bras vers le ciel.

- La mort est certes un repos, mais un repos de la bêtise humaine… La plupart de ses gens ont ruiné eux-mêmes leur existence. La plupart de mes morts doivent souvent se « retourner dans leur tombe »… Pour dormir en paix, il faudrait premièrement que leur mort soit acceptée. Les gens ont tellement peur de la mort… Ah… la peur… c’est fou tout ce qu’on peut faire en maitrisant cette simple émotion. Les gens ont peurs de ce qu’ils ignorent, la mort est la bête noire et mystérieuse que personne, à part la mort elle-même, ne peut maitriser… Les gens angoissent à leur mort approchante, s’ils meurent angoissés, comment peuvent-ils trouver le repos éternel?

Il glissa ses doigts sur la pierre froide de la tombe prenant une grande respiration comme s’il avait tout à coup manqué d’air… Ses yeux se fermèrent lentement et il laissa tout son corps retomber comme celui d’un pantin sans vie. Il laissa le vent le caresser par cette douce nuit. Ses cheveux cachèrent un peu son visage, un sourire figé au bout des lèvres.

- L’homme de cette société angoissé ne comprend rien et à peur de ce qu’il ignore, la mort étant l’inconnue, ils cherchent à maitriser cet aspect. La mort doit donc être maitrisés entre quatre murs, comment mieux s’assurer que celui-ci ne reviendra pas les hanter en leur offrant une « statue » à leur souvenir. Ils savent que le corps est prisonnier sous terre et non à leur poursuite… En réalité, j’ignore à quoi servent réellement les tombes, pour des gens célèbres pour qu’on puisse se souvenir d’eux, je peux comprendre, mais pour des hommes qui ont bu et qui sont morts dans leur crasse de vie, je ne comprends pas. Je n’ai jamais accordé beaucoup d’importance à ceux qui ont outrepassé… Néanmoins, je ne crois pas que le but premier des épitaphes soit pour le mort, mais bien pour les vivants, je ne vois pas ce que ferait le mort avec un morceau de pierre.

Un frisson parcourut le corps de Kay en ouvrant son œil viable et voyant la femme s’amuser avec le feu. Il ouvrit son deuxième œil et dans un mouvement peu habituel relevant pour s’asseoir, comme si on avait tiré sur une ficelle accrochée à son torse. Ses bras pendants au bout de ses épaules se plièrent lentement pour se poser sur ses cuisses et tournèrent la tête vers la demoiselle. Il se tourna pour être plus face à Diane et releva un bras. Il posa ses doigts froids sur la main de la demoiselle. L’homme se releva lentement pour s’approcher de la dame en lui lâchant la main, mais laissant ses doigts se glisser sur la pierre où était assise la dame.

- Je me nomme Kay… Kay Mac.Ambre, mais ceux qui me connaisse m’appelle pas vraiment… héhéhé.

Il afficha un sourire amusé, plutôt doux ce qui n’était pas commun chez Kay, mais le sourire semblait franc.

- Non merci pour les allumettes, je ne fume pas. Assez de trucs peuvent me tuer sur cette, je n’ai pas besoin de ça.

Naturellement, il alla s’asseoir tout près de la demoiselle, approchant lentement son visage du sien pour la regarder de plus près.

— D’où viens-tu? J’ai vu beaucoup de choses dans ma courte vie, mais je n’ai jamais vu une dame comme toi, pas jusqu’à présent. Surtout aussi découverte, disons qu’ici la pudeur est une chose très présente dans la culture de cette société occidentale…

Diane n'avait pas peur dela mort. Elle la voyait comme une chose inévitable, comme la vieillesse. Comme elle n'avait jamais quitté son village et sa communauté et avait toujours vécu en sécurité, elle n'avait jamais envisagé qu'elle pourrait un jour mourir par accident. On n'avait pas peur d'une naissance donc pourquoi avoir peur de la mort ?

Les paroles de Kay la firent réfléchir. Elle eut le genre de pensée, de prise conscience qui angoisse et qu'on a envie de mettre au fond d'une boite pour s'en occuper plus tard...ou jamais. Kay fini son discours et elle eut un petit sourire triste. Elle préféra ne pas répondre pour l'instant et retourna à ses allumettes. Elle observa Kay se mouvoir étrangement. Naïvement, elle songea qu'il devait être très fatigué ou avoir mal au dos. Ses mouvements étaient lents et laissait place à un silence. Diane ne s'aperçut presque pas du blanc dans la conversation, elle regardait le garçon se mouvoir tel un reptile avec une certaine fascination, son allumette entre ses doigts à la flamme agonisante. Il lui saisit la main alors qu'il se relevait. Ses doigts étaient froids, très fins et ce contact fut bref et léger. La jeune femme ne tressaillit pas, elle baissa juste rapidement les yeux sur leurs deux mains entrecroisées sans dire un mot. Son sourire réapparut lorsque le jeune homme se présenta. Ce nom était original elle ne l'avait encore jamais entendu. Le voir sourire avec douceur à son tour la mettait plus à l'aise. Il refusa les allumettes et elle eut un petit rire cristalin.

« Personne n'est totalement invulnérable alors à quoi bon se priver ? dit elle avec malice. Ceux qui ont peur de la mort auraient mieux fait de ne pas naître. »

Cette dernière phrase faisait écho à leur précédent sujet de conversation sans vraiment la ramener sur le tapis. Mais cela résumait bien le point de vue de l'amazone. Elle reprit sa pipe entre ses lèvres et tira une bouffée, bougeant un peu pour laisser une petite place à Kay qui se hissait sur la pierre. Cette soudaine proximité la surpris un peu. Personne n'avait été aussi proche physiquement depuis qu'elle avait quitté son village. Cela lui manquait mais le fait que Kay soit du sexe opposé la gênait un peu. Elle ne savait trop sur quel pied danser. De près il ressemblait à une fille... Elle recula légérement son visage alors que lui approchait le sien pour mieux l'observer.

Il lui fit remarquer sa tenue légère. En effet, sous sa cape, elle ne portait qu'une bande de cuir nouée dans le dos pour compresser sa petite poitrine et ne pas être gênée à cheval. Elle avait également un corsaire moulant en guise de pantalon et des sandales aux pieds. Étonnée par la remarque du garçon, elle regarda sa tenue et bafouilla :

« Ah bon ? Je ne suis pas habillée comme il faut ? C'est que là du je vois, il fait assez chaud, je ne porte que ce qui est utile pour me déplacer, monter à cheval... Mais c'est vrai qu'ici tout le monde porte du tissus des pieds à la tête... »

Elle ne comprenait qu'à moitié cette habitude. Ici il faisait plus frais que chez elle, mais quand même... Les gens préféraient cacher leur corps. Elle poursuivit pour répondre à la question :

« Je suis une amazone, je viens d'un pays au sud ou il y a beaucoup de foret. Nous ne sommes pas nombreux dans mon village par rapport à ici. Et il n'y a que des femmes. En fait...- elle regarda rapidement le jeune homme des pieds à la tête – tu es le premier homme que je vois d'aussi près... »

Un petit silence s'installa...elle continua de regarder et ajouter avec un sourire espiègle.

« Ce qu'on m'avait dit était vrai, ils ne sont pas tous grands, méchants et poilus. »

Kay s’approcha un peu plus de la jeune fille et prit une douce respiration de l’odeur féminine qui se dégageait de la jeune et douce Diane. Il ferma les yeux un brefs instants pour une raison obscure et les rouvrit paisiblement pour l’observer de nouveau. Malgré la proximité de Kay, aucune partie de son corps ne touchait la jeune femme, aucun frôlement, aucune caresse.

- Tu as raison, personne n’est intouchable, mais personne n’a choisi de vivre. C’est n’est pas tout le monde qui sont fait pour l’aventure et la frénésie. La mort est un grand fléau qui peut mettre fin à des souffrances et à des joies. Pour beaucoup de gens dans une société comme ici, les biens matériels prennent une place vitale, mourir signifierait la perte des biens acquis à la sueur de leur front.

Kay semblait sentir la gêne de l’amazone et sourit un peu plus machiavéliquement. Il passa sa langue sur ses crocs en ouvrant un peu plus son œil mort. Le blanc de son iris réfléchissait la lueur de la lune qui les regarda de son trône.

- Tu es dans une société humaine occidentale… Fais attention à toi, il est dangereux de trop se découvrir… Les yeux chastes et pudiques des autorités n’aiment pas les femmes dites ici exhibitionnistes. Néanmoins, si tu veux te couvrir sans te gêner de lourd vêtement. Il y a un tissu nommé la soie, on peut en faire de magnifique robe légère et volatile. Elle cache sans coupé le vent et c’est très doux. Son seul défaut c’est qu’il est fragile. Mais sur une aussi belle peau, elle ferait sensation.

Kay afficha un petit sourire amusé alors qu’il connut les origines de la jeune femme. Son œil bleu trahissait un « je m’en doutais », alors que son sourire restait figé dans la glace pour rester amusé et perlé d’une malice.

- Comment une société de femmes peut-elle avoir des enfants sans homme? J’avais déjà lu qu’une telle société existait, mais je ne croyais plus que de nos jours une telle société avait pu survivre loin des yeux interrogateurs de la société occidentale. Ils auraient bien vite fait de censurer vos tenues et votre façon de vivre.

À son dernier commentaire sur les hommes un étrange sourire s’afficha sur les lèvres de Kay. Sa main se déplaça lentement pour frôler sa cuisse partant du genou et remontant lentement vers le haut de la cuisse, touchant la chair chaude et ferme.

- Oui c’est vrai… je ne suis pas poilu…

Kay libéra de sa gorge un rire étrange, son rire empreint de malveillance et d’amusement sadique. Son œil non viable s’agrandit un peu plus comme si celui-ci s’était réveillé et laissait prévaloir ses envies de peur et d’angoisse.

Le contact physique manquait à Diane, cependant, qu'un inconnu, du sexe opposé qui plus est, se tienne aussi près d'elle la dérangeait un peu. S'il avait été une femme, elle n'aurait certainement pas hésité à toucher ses cheveux ou ses vêtements. Pour l'instant, elle ne se sentait pas encore assez en confiance pour avoir ce genre d'attention, c'est pourquoi elle estima le contact de la main du garçon tout à l'heure suffisant pour une première approche.

Elle l'écouta parler de la pudeur et des habitudes de cette société avec attention, s'efforçant à ne pas l'interrompre pour poser la question qui lui brûlait les lèvres : que risquait on à se promener dénudé ? La réponse avait l'air tellement évidente aux yeux du garçon que la naïve petite sauvageonne resta muette de peur de passer pour une idiote.

Elle se sentit plus à l'aise lorsque la conversation se dirigea vers les coutumes de son propre peuple. Elle sourit avec sincérité à Kay lorsqu'il aborda la question, s'apprêtant à répondre, lorsqu'il éclata d'un grand rire caquetant, le genre de rire qui n'inspirait rien de bon, renforcé par cette oeil blanc écarquillé qui brillait à la lune. La jeune fille resta silencieuse, se penchant légèrement en arrière pour éloigner son visage de celui du garçon et étira un petit sourire timide, sans participer à l'hilarité. Elle lança un regard comme emprunt de scepticisme, du genre « tu te sens bien ? » sans émettre une seul remarque, dans un silence poli. Lorsque le rire du garçon s'éteignit, elle reprit la parole, contente de pouvoir lui expliquer ses origines.

« Eh bien, dans ma région, il n'y a pas beaucoup de monde, juste quelques villages en dehors de la forets. C'est surtout les paysans qui viennent parfois nous demander de partir parce qu'il croit qu'on empoisonne leurs vaches ou qu'on mange leurs enfants. Mais c'est pas vrais du tout ! Nous, on veut juste vivre dans la foret ! D'ailleurs, ça fait longtemps qu'on est là, on arrive à vivre dans la foret alors que les villageois ne tiennent pas une semaine ! dit elle pleine de fierté. »

Elle changea de position sur la stèle de façon à libérer ses mains qu'elle agitait frénétiquement pendant son récit pour mieux expliquer, enthousiasmer par le sujet.

« En fait, lorsqu'une fille se sent prête, elle peut quitter le village pour partir chercher un homme et tomber enceinte. Souvent ça ne dure pas longtemps. Après, on s'occupe d'elle, les guérisseuses lui donnent des plantes pour l'aider à avoir une fille. Si le bébé est un garçon, on le laisse près d'un village pour qu'il soit recueillit. Certains disent qu'on les mange mais c'est pas vrai, hihi ! »

Elle bougea à nouveau sur la pierre, son enthousiasme s'effrite un peu, ses mains ne s'agitent plus et elle baisse les yeux avec un petit sourire triste.

« Moi, les enfants, je m'en fiche. Je suis partie pour découvrir le monde. ça m'a pris comme ça ! J'étais curieuse de voir de nouvelles choses ! Mais ... j'avoue que je suis un peu déçue. Je n'apprend rien de formidable comme on m'avait dit. J'apprends plutôt des choses nulle comme ne pas avoir le droit de porter les vêtements qu'on veut. »

Elle se garda bien de parler des son pouvoir et de l'école de Cairn. On lui avait conseiller de ne pas trop faire étalage de son don en public. Apparemment, les villageois n'aimaient pas trop tout ce qui sortait de l'ordinaire.

Son récit achevé, Diane levé ses grands yeux brillant vers Kay. Maintenant qu'elle était habitué à l'obscurité, elle arrivait à distinguer ses traits juvéniles et plutôt doux. Ce garçons si original savait peut être des choses... Elle étira un sourire malicieux et demanda avant qu'il ne pose d'éventuelles questions sur ce qu'elle venait de dire :

« Et toi ? t'as des choses à m'apprendre ? »